- 18 déc. 2025
- Élise Marivaux
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Vous avez peut-être remarqué que votre ordonnance de générique coûte 15 € dans un État et 60 € dans un autre, alors que c’est exactement le même médicament. Ce n’est pas une erreur. Ce n’est pas une fraude. C’est la réalité du système de santé américain, où les prix des médicaments génériques varient drastiquement d’un État à l’autre - même pour la même pilule, achetée le même jour.
Pourquoi le même médicament coûte-t-il si différent selon où vous vivez ?
La réponse ne se trouve pas dans la qualité du médicament, ni dans le laboratoire qui le fabrique. Les génériques sont identiques à leurs versions de marque, en composition, en efficacité, en sécurité. Le problème, c’est le système qui les distribue. Derrière chaque ordonnance, il y a une chaîne complexe : fabricants, grossistes, gestionnaires de prestations pharmaceutiques (PBMs), pharmacies, et assureurs. Chaque maillon applique ses propres règles, et ces règles changent d’un État à l’autre.
Les PBMs, ces intermédiaires qui négocient les prix pour les assureurs, sont les véritables acteurs de cette disparité. Ils signent des contrats secrets avec les pharmacies et les fabricants. Dans certains États, ces contrats sont transparents. Dans d’autres, ils sont cachés. Résultat : un patient à Californie paie 25 € pour un mois de atorvastatine, tandis qu’un patient au Texas paie 90 € pour la même chose - avec la même assurance.
Les lois locales font toute la différence
Depuis 2016, plusieurs États ont tenté de réagir. Le Vermont a été le premier à exiger la transparence des prix. La Californie a suivi avec des lois obligeant les PBMs à révéler leurs marges. Le Maryland a même essayé d’interdire les hausses abusives sur les génériques. Mais en 2018, un tribunal fédéral a déclaré cette loi du Maryland inconstitutionnelle, arguant qu’un État ne peut pas réguler les prix d’un produit qui traverse les frontières. Cela a freiné les efforts d’autres États.
Pourtant, les États n’ont pas abandonné. Dix-huit États ont maintenant créé des conseils d’accessibilité aux médicaments, chargés d’analyser les prix et de recommander des plafonds. La loi sur la réduction de l’inflation de 2022 a imposé un plafond de 35 $ (environ 32 €) par mois pour l’insuline aux bénéficiaires de Medicare - mais cela ne concerne que 32 % des patients. Pour les autres, tout dépend de leur État.
Comment les assurances rendent les prix encore plus confus
Il y a un paradoxe étonnant : payer en espèces est souvent moins cher que d’utiliser son assurance. Oui, vous avez bien lu. Un patient qui paie cash pour un générique peut économiser entre 30 % et 70 % par rapport à ce qu’il paierait avec son assurance. Pourquoi ? Parce que les PBMs utilisent des formules compliquées pour calculer les remboursements. Ils ne remboursent pas le prix réel du médicament. Ils remboursent un prix qu’ils ont négocié - souvent bien plus élevé que le prix de marché.
Les pharmacies indépendantes comme Blueberry Pharmacy ou Cost Plus Drug Company, qui vendent directement à prix coûtant, ont explosé en popularité. Elles n’utilisent pas les PBMs. Elles affichent le prix réel. Et ce prix est souvent deux fois moins cher que ce que l’assurance propose. Mais ces pharmacies ne sont pas partout. Dans les zones rurales, vous n’avez peut-être même pas le choix. Et là, les prix montent en flèche.
Les données parlent d’elles-mêmes
Une étude de l’Université de Californie (USC Schaeffer Center) en 2022 a montré que les Américains paient en moyenne 13 % à 20 % de trop pour les génériques à cause des pratiques opaques des PBMs. Dans les États avec des lois de transparence, les patients paient 8 % à 12 % moins cher. Dans les États sans lois, les prix restent élevés - et personne ne sait pourquoi.
Les données du FDA montrent aussi que les prix des génériques chutent quand il y a plus de concurrents. Mais cette baisse ne se produit pas partout. Dans certains États, un seul grossiste contrôle la distribution. Dans d’autres, plusieurs pharmacies se partagent le marché. Résultat : un même médicament peut coûter 300 % plus cher à quelques kilomètres de distance.
Le rôle des tarifs et des importations
Les États-Unis paient en moyenne 2,78 fois plus pour leurs médicaments que les autres pays riches. Cette disparité mondiale pèse sur les prix locaux. Les génériques sont souvent fabriqués en Inde ou en Chine. Mais les tarifs douaniers, les retards logistiques, et les coûts de transport varient selon les routes empruntées. Certains États reçoivent les médicaments plus rapidement, à moindre coût. D’autres, moins bien desservis, payent plus.
De plus, les laboratoires américains fixent les prix de départ. Si le fabricant vend un générique à 50 € au grossiste, le prix final dépend de qui le revend, où, et comment. Un État avec une forte concurrence entre pharmacies va voir les prix baisser. Un État avec une seule chaîne de pharmacies ? Les prix restent hauts.
Que faire si vous êtes dans un État où les prix sont élevés ?
Vous n’êtes pas impuissant. Voici ce que vous pouvez faire, quel que soit votre État :
- Comparez les prix avec GoodRx ou SingleCare : ces sites affichent les prix réels en cash dans les pharmacies locales. Parfois, c’est 80 % moins cher que votre remboursement d’assurance.
- Payez en espèces : si vous avez une assurance, demandez à la pharmacie de ne pas la facturer. Parfois, le prix cash est plus bas que votre copaiement.
- Utilisez des pharmacies à prix direct : Cost Plus Drug Company, Blink Health, ou même certaines chaînes comme Walmart et Costco proposent des génériques à prix fixe. Ce n’est pas magique - c’est juste plus transparent.
- Appelez votre pharmacie : demandez quel est le prix cash. Ne vous fiez pas à ce que vous voyez sur votre facture d’assurance.
- Surveillez les lois de votre État : si votre État a une loi de transparence, vous avez plus de pouvoir. Si non, vous devez être plus actif.
Le système n’est pas juste. Mais il n’est pas impénétrable. Ce qui compte, c’est que vous sachiez que vous avez des options - même si elles ne sont pas les mêmes selon votre code postal.
Qu’est-ce qui va changer à l’avenir ?
Les réformes fédérales comme la loi sur la réduction de l’inflation vont réduire les coûts pour les seniors. Mais pour les autres, les écarts vont probablement persister. Les PBMs n’ont pas de raison de changer leur modèle si les États ne les obligent pas à le faire. Et les tribunaux continuent d’empêcher les États de réguler directement les prix.
La seule voie réelle pour réduire ces disparités, c’est la transparence. Si tout le monde peut voir combien un médicament coûte vraiment, les prix vont naturellement baisser. C’est ce que les États comme la Californie ont compris. Ceux qui ne l’ont pas encore fait, continuent de payer le prix fort - sans savoir pourquoi.
Le générique n’est pas cher parce qu’il est mauvais. Il est cher parce que le système est cassé. Et ce système ne fonctionne pas de la même manière à New York, à Atlanta, ou à Portland. Votre lieu de résidence détermine combien vous payez - même pour la même pilule. C’est inéquitable. Mais c’est réel. Et vous pouvez le changer, un ordonnance à la fois.
Pourquoi mon assurance ne rembourse-t-elle pas le prix réel du médicament générique ?
Les gestionnaires de prestations pharmaceutiques (PBMs) négocient des contrats avec les pharmacies et les fabricants. Ils définissent un prix de remboursement qui n’a souvent rien à voir avec le prix réel du médicament. Ce prix est souvent plus élevé que ce que vous payeriez en cash. L’assurance ne rembourse pas le coût réel : elle rembourse ce que le PBM a décidé de payer.
Est-ce que payer en espèces est vraiment moins cher que d’utiliser mon assurance ?
Oui, souvent. Pour les génériques, environ 4 % des ordonnances sont payées en espèces - et 97 % de ces ordonnances sont pour des génériques. Des études montrent que les patients paient jusqu’à 70 % moins en cash. Cela vient du fait que les PBMs ajoutent des marges invisibles. En payant cash, vous évitez ces marges.
Pourquoi certains États ont-ils des prix plus bas que d’autres ?
Les États avec des lois de transparence - comme la Californie, le Vermont ou le Maryland - obligent les PBMs à révéler leurs prix. Cela crée plus de concurrence et réduit les abus. Dans les États sans ces lois, les PBMs peuvent fixer des prix élevés sans être tenus de les justifier. La concurrence entre pharmacies est aussi plus faible dans les zones rurales, ce qui augmente les prix.
Les lois fédérales vont-elles éliminer ces disparités ?
Pas complètement. La loi sur la réduction de l’inflation ne s’applique qu’aux bénéficiaires de Medicare. Pour les autres, les disparités restent. Les tribunaux ont déjà bloqué les tentatives d’États de réguler directement les prix. La seule solution durable est la transparence - et elle doit venir des États, pas du fédéral.
Comment savoir quel est le vrai prix d’un générique dans ma région ?
Utilisez des outils comme GoodRx, SingleCare ou Blink Health. Entrez le nom du médicament, votre code postal, et comparez les prix en cash dans les pharmacies locales. Vous verrez souvent des écarts de 200 % entre deux pharmacies à 5 km l’une de l’autre. C’est la seule façon de connaître le vrai prix.